Le 17 octobre 2010, la Vice-Ministre des Affaires étrangères Fu Ying a accordé une interview à RTM, à Maghreb Arabe Presse, à Atlantic radio et à l'Economiste, en marge de la 3e édition de la World Policy Conference organisée par l'Institut français des Relations internationales :
Q : Comment voyez-vous les différences culturelles entre l'occident d'un côté et le continent africain, le monde arabe, la Chine et les autres régions du monde de l'autre ?
R : La culture chinoise préconise le respect mutuel et la modestie, et non une attitude sermonneuse. Par contre, les Européens, dans leur culture, ont plus souvent tendance à donner des leçons. Ceci dit, les différences culturelles ne constituent pas l'essentiel du problème. L'Occident dont l'Europe, les pays émergeants et les autres pays du monde sont appelés à explorer des moyens efficaces pour coexister en paix au 21e siècle et relever les défis à travers une coordination étroite. Nous n'avons pas besoin de guerre chaude ni de guerre froide. Nous n'avons pas à craindre les divergences. Le plus important, c'est de se traiter dans le respect mutuel et avec un esprit large.
Q : L'Occident accuse calomnieusement la Chine d'avoir pillé des ressources partout dans le monde. Qu'en pensez-vous ?
R : Les chiffres sont les plus parlants. Prenons l'exemple de l'Afrique. 69% de ses ressources sont exportées vers l'Europe et les Etats-Unis, et seulement moins de 9% vers la Chine. Les relations sino-africaines sont surtout marquées par l'égalité. Jusqu'aux années 1970, la Chine se trouvait dans un environnement international difficile. Le peuple chinois ne saurait jamais oublier que l'Afrique lui a beaucoup soutenu sur la scène internationale. La Chine ne s'est jamais ingérée dans les affaires intérieures des pays africains. En faisant autant qu'elle peut pour aider l'Afrique, elle a notamment travaillé pour développer des échanges économiques et commerciaux égaux avec celle-ci.
Q : Vous avez dit que la sécurité alimentaire est un facteur important pour la réalisation de la paix. Qu'est-ce que la Chine a fait pour s'assurer de la sécurité alimentaire ?
R : La Chine a vécu une économie de pénurie jusqu'aux années 1980. Les Chinois de ma génération ont toujours la mémoire de ce qu'était la faim. La nourriture est essentielle pour l'homme. Autrefois, les gens échangeaient la question « Avez-vous mangé ?» pour se saluer. Voilà la réalité chinoise de l'époque. Par contre, la génération de ma fille n'a jamais souffert de la faim et s'intéresse au contraire à suivre un régime. La Chine, désormais sortie de la pénurie alimentaire grâce à la réforme et aux progrès technico-scientifiques représentés notamment par le riz hybride, est maintenant en mesure de nourrir ses 1,3 milliard d'habitants. Autosuffisante sur le plan alimentaire, elle peut même exporter du riz. Nous sommes bien conscients qu'un grand pays comme la Chine ne peut compter sur nul autre qu'elle-même pour assurer sa sécurité alimentaire. C'est ma première visite au Maroc, mais je suis très impressionnée par votre agriculture économe en eau et la qualité de vos produits agricoles. Ce sont là des expériences dont la Chine peut s'inspirer. Car une fois leurs besoins élémentaires satisfaits, les Chinois ont des attentes croissantes sur tous les plans, surtout en matière de produits agricoles de qualité meilleure. Nos deux pays peuvent donc développer un partenariat dans ce domaine.
